mardi 6 février 2007

Horikoshi, le génie...


Quand le chasseur du programme 9shi (autrement appelé A5M kansei type 96) eut balayé du ciel chinois tous ses opposants, ses succès foudroyant mirent un terme aux querelles divisant les pro-biplan et les pro-monoplan de chasse. L’A5M fut confronté aux meilleurs chasseurs de sa génération, Gloster Gladiator, Dewoitine D510 et autre Curtiss et il sorti vainqueur de tous ces duels. Pourtant un point important avait été mis en lumière aux cours des combats au-dessus du pays des fils du ciel : un rayon d’action médiocre empêcherait le type 96 d’accompagner les bombardiers nippons sur leurs objectifs et ceux-ci risquaient d’être massacrés par l’aviation chinoise pilotée par des mercenaires de toutes nationalités. Ce problème crucial fut le point de lancement du programme de construction du chasseur embarqué 12 shi.
Les prévisions des experts de la Marine Impériale allaient se révéler exactes car plusieurs raids de bombardement sur des objectifs lointains s’étaient avérés désastreux pour les attaquants. Une seule solution s’imposait dès lors l’accélération du programme 12shi. Le 19 mai 1937, la Marine Impériale déposa donc auprès de Nakajima et Mitsubishi un avant-projet de construction du chasseur 12shi (1937 = la douzième année du règne Shôwa). Les évènements se précipitant et la guerre en chine se déclarant ouvertement, l’opposition de l’Occident à l’expansion japonaise fit comprendre aux responsables de la Marine Impériale qu’ils auraient besoin d’un chasseur aux performances exceptionnelles. Ils déposèrent auprès des constructeurs un cahier des charges drastique.



Les exigences de la Marine étaient exorbitantes et dépassaient de loin l'effort fournis pour la réalisation de l'A5M. Les ingénieurs japonais se trouvaient devant la quadrature du cercle : on leur demandait tout simplement d'égaler ce qui se faisait de mieux dans le monde au niveau de la vitesse, de la puissance, mais aussi d'obtenir une autonomie et une maniabilité exceptionnelle... écoutons ce qu'en disait Jiro Horikoshi lui-même: " Les exigences de la Marine dépassaient de beaucoup les possibilités offertes par les normes de constructions nationales. Objectivement, il était impossible, avec les méthodes conventionnelles, de remplir toutes les conditions formulées pour le nouvel avion. Une vitesse, une puissance ascensionnelle, un rayon d'action, un rayon de virage, une visibilité pour le pilote et des conditions d'atterrissage et de décollage qui égalaient ou dépassaient chacune des caractéristiques optimales des meilleurs chasseurs existant au monde". En janvier 1938, une réunion entre ingénieurs et marins s'était tenue à Yokosuka. Le fameux commandant Genda, y prit la parole et suivant son expérience de la Campagne de Chine y formula les nouvelles exigences du combat aérien. La Marine insista pour obtenir satisfaction sur tous les points demandés et beaucoup d'ingénieurs présents ne cachèrent pas leur désapprobation, faisant remarquer à leurs interlocuteurs que c'était tout simplement de l'utopie. La délégation de Nakajima affirma que le nouveau chasseur était inconstructible et la compagnie se retira de la compétition; Restait à la table des négociations l'équipe de Mitsubishi sous la direction de Jiro Horikoshi. Cette équipe était composée de Sone Yoshitoshi et Tojo Teruo aux calculs, Yoshikawa Yoshio à la cellule, Inoue Denichiro et Tanaka pour le moteur, Hatakenaka Yoshimi pour l'armement et l'équipement et pour finir Kato Sadahiko et Moror Takeyoshi au train d'atterrissage.
L'équipe ainsi formée s'attaqua à la tâche et éssaya de résoudre les problèmes ardus qui lui était posé. Pour une puissance limitée on devait, pour avoir un appareil de grande qualité, réduire le poids et la traînée et cela devint le souci majeur d'Horikoshi. Une partie du problème fut résolu par l'utilisation d'un nouveau métal, l'ESD (extra-Super Duralumin) de Sumitomo, pour la plupart du revêtement. Les assemblages lourds et volumineux furent remplacés par des petits raccords à l'emplanture ce qui permettait aussi, grâce au système de connexion de l'aile au fuselage, de pouvoir détacher la partie arrière de celui-ci en enlevant qu'une douzaine de boulons. En éliminant aussi une bonne partie d'assemblages superflus, un nouveau gain de poids fut atteint mais aussi de nombreuses opérations de montage en usine furent éliminées. Une bonne manœuvrabilité exigeait une charge alaire réduite et le chiffre de 105kg/m² fut atteint. Les exigences de maniabilité furent atteintes au détriment d'autres qualités : il fallut rogner de la vitesse en palier et en piqué ce qui fut un handicap plus tard face aux appareils américains. Un essai comparatif face au chasseur Nakajima de l'Armée de terre, le Ki43 Hayabusa, équipé du même moteur et d'une hélice à vitesse constante fut significatif de la supériorité du Reisen : Vitesse, piqué, chandelle et aptitudes générales au combat lui était favorable de plus il pouvait emporter une charge plus importante. Avant même la finition du premier prototype pourtant, de violentes discussions entre spécialistes et pilotes, notamment le Commandant Genda et le Commandant Shibata, tous deux vétérans des combats en Chine, mirent à jour des exigeances particulières et parfois divergentes de ceux-ci quant aux qualités du futur chasseur 12shi; pour l'un la maniabilité était indispensable, pour l'autre c'était au contraire la vitesse et l'autonomie qui était primordiale et ce au détriment même de cette maniabilité. Pour le commandant Shibata, c'était avant tout une question de qualité de pilotage. Ces discussions furent suivies d'une polémique qui faillit détruire le projet 12shi; l'équipe d'Horikoshi étant submergée de rapports contradictoires de la part des officiels et des pilotes de la Marine. Horikoshi, malgré une colère justifiée, se plia à la volonté de tous et se remit au travail. Il vérifia tous les calculs pour en sortir conforté dans ses certitudes : Le 12shi était bien l'appareil que tous attendaient et que le chasseur réclamé par la Marine ne serait jamais aussi performant que celui en cours de fabrication! Mitsubishi soutint son ingénieur face aux pontes de la Marine Impériale et celle-ci donna enfin son accord au 12shi.
Le 16 mars 1939, le premier prototype du 12shi sortit de l'usine de Nagoya et ses essais débutèrent.


La suite de cette histoire dans le très bon fascicule
des Ailes de Gloire réédité en numérique

Commandez au http://www.amv83.net/along

Aucun commentaire: